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Rose Bertin
Rose Bertin -Robes de la vierge à l'enfant-Kleider der Jungfrau mit Kind Montflières
Rose Bertin, légendaire créatrice de mode. Rose Bertin, eine Modelegende
Rose Bertin, entrée de la chapelle du carmel. Eingang der Karmelkapelle.
Rose Bertin au Carmel d'Abbeville
Rose Bertin - Robes de la vierge à l'enfant-Kleider der Jungfrau mit Kind Montflières

Rose Bertin, une
icône de la mode

Histoire de Rose Bertin et des deux robes d’or – presque un conte de fées

 

Dans les contes, il n’est pas rare que les princesses soient vêtues de robes de fil d’or. L’histoire que je m’apprête à vous narrer est celle de deux robes en drap d’or, confectionnées par une jeune femme issue d’un milieu modeste à la demande d’une reine, la dernière de France.

 

Rose Bertin, que l’on baptisa Marie-Jeanne, naquit en 1747, sixième enfant d’un cavalier de la maréchaussée d’Abbeville et d’une garde-malade. Nul doute que des fées s’étaient penchées sur son berceau, faisant vœux qu’elle devînt une femme aussi talentueuse qu’ambitieuse. À l’âge de 16 ans, ses parents l’envoyèrent à Paris où elle comptait réussir, fondant sa foi sur la prophétie d’une bohémienne qui lui avait prédit, alors qu’elle avait neuf ans, qu’elle ferait une grande fortune à la cour. Elle fut embauchée chez mademoiselle Forgel, marchande de modes au Trait galant. 

 

Les années passèrent toutefois sans que la prédiction se réalisât. Jusqu’au jour où cette maison de modes fréquentée par les illustres personnages de l’époque reçut commande de deux robes de mariées à livrer chez la princesse de Conti. Une dame âgée accueillit Rose et la pria de les lui présenter. Elle s’exécuta sans trop comprendre la raison pour laquelle cette « vieille femme », somme toute une femme de chambre « de peu d’apparence », lui faisait une telle requête. Les robes n’étaient-elles pas destinées aux filles illégitimes que feu le comte de Charolais avait eu avec madame de la Saune, sa maîtresse ? Mais Rose ne savait pas que ce dernier avait été l’oncle et tuteur du prince de Conti qui avait quant à lui sollicité la légitimation de ses cousines et prié la princesse douairière, sa belle-mère, d’organiser leurs mariages. 

 

Après avoir inspecté les robes avec satisfaction, la vieille femme invita Rose à la rejoindre pour s’asseoir et se réchauffer au coin du feu ; c’était l’hiver et le froid était rigoureux. Après avoir admiré les robes et s’étant enquise de savoir si Rose connaissait les futures épouses dont la mère se fournissait au Trait galant, ce qui n’était pas le cas, elle lui posa toutes sortes de questions, lui témoignant de la sympathie. Rose se sentait déstabilisée par les témoignages d’amitié de son interlocutrice quand une servante fit irruption dans la pièce, surprise d’y trouver « son altesse ». La confusion et les excuses de Rose furent accueillies avec grande bonté par la noble dame qui lui assura qu’elle ne tarderait pas à recevoir des preuves de sa satisfaction.

 

Peu de temps après, un courrier de la princesse au Trait galant, demandait que la jeune livreuse fût chargée du trousseau de la fille du duc de Penthièvre. Ainsi Rose commença-t-elle chaque jour à se rendre à la toilette de l’épousée pour qui elle arrangeait en outre les bouquets de fleurs fraîches, accessoires de mode très en vogue à l’époque. Avoir eu l’heur de plaire à madame de Conti la mit sur les rails d’une carrière qui s’annonçait brillante. Associée dès cet instant pour moitié au Trail galant, elle dût d’abord éviter un écueil de taille, tant par respect pour sa princesse que par crainte d’entacher sa réputation et de mettre son avenir en péril : les assauts du duc de Chartres, l’époux de mademoiselle de Penthièvre, qui alla jusqu’à envisager un enlèvement pour la soumettre. Malgré toutes ses inquiétudes, le destin la mit en présence du duc alors qu’elle se trouvait chez la comtesse d’Usson. La jeune modiste ose alors prendre un fauteuil et s’asseoir à côté du duc. La comtesse, surprise par cette attitude inconvenante, la somme de s’expliquer, ce que fait Rose qui déclare que le duc, saisi de stupéfaction devant tant d’aplomb, malgré son rejet, veut faire d’elle sa maîtresse et songe même à la faire enlever. Le duc se reprend, alléguant que de tels charmes ne sauraient lui être refusés. Rose prétend alors que s’il préfère une marchande de modes à une princesse bien née et tout acquise à lui, elle peut tout aussi bien se montrer familière avec lui, lui donnant le coup de grâce en expliquant triomphante : « que monseigneur n’oublie pas son rang, et je me souviendrai de l’extrême distance qui existe de lui à moi. » Le duc ne l’importuna plus. 

 

Dès lors, tenue en haute estime par toutes les dames nobles mises au courant par la comtesse d’Usson, Rose et ses affaires prospérèrent.  À cette époque, en 1770, Rose, alors âgée de 23 ans, ouvre rue du Faubourg Saint-Honoré son magasin de modes, Le Grand Mogol, qui connaîtra rapidement un formidable essor grâce à son sens des affaires et à ses innovations : silhouettes allégées, création de robes champêtres en mousseline pour satisfaire la reine en quête de vêtements plus fluides après ses deux grossesses, robes de grossesse, coiffures d’une grande extravagance…

 

La princesse de Conti qui s’était prise d’affection pour elle décida de faire sa fortune et l’introduisit auprès de la fiancée du dauphin, la future reine Marie-Antoinette. Rose Bertin dresse ainsi le portrait de la femme auprès de laquelle elle passa vingt années de sa vie : « Qu’on se figure un teint d’une blancheur éblouissante, où se mêlaient des couleurs aussi fraîches que la rose printanière ; de grands yeux d’un bleu azur, à fleur de tête ; un front que couronnait une forêt de cheveux blonds... » Immédiatement séduite par la beauté et la grâce de la souveraine, Rose lui voua une grande admiration ; elle la défend d’ailleurs bec et ongles dans ses mémoires.

 

Longtemps, Marie-Antoinette ne put pas avoir d’enfants. Sur les conseils de Rose, devenue, comme elle l’appelait, sa « ministre des modes », et certainement sa familière, elle se rendit à Bellancourt, près d’Abbeville, pour se placer sous la protection de Notre-Dame de Monflières. Après la naissance de la princesse Marie-Thérèse-Charlotte de France – la seule des quatre enfants de la reine et de Louis XVI à avoir survécu aux maladies et à la Révolution –, elle commanda deux robes en drap d’or pour la statue miraculeuse de la Vierge à l’Enfant de la chapelle de Monflières, à laquelle les pèlerins vouaient un culte fervent depuis le XIe siècle (voir l’article sur les trois chapelles sous la rubriques Balades/Patrimoine). Ces deux vêtements sur lesquels les siècles écoulés ne semblent pas avoir eu aucune prise sont aujourd’hui exposés au Carmel d’Abbeville (voir l’article sur carmel d’Abbeville Rubrique Balades/Patrimoine).

 

Rose Bertin resta fidèle jusqu’au bout à sa souveraine, lui livrant même des vêtements en prison. Elle s’enfuit en Angleterre en 1793 pour échapper à la Terreur et à la guillotine. De retour en France deux ans plus tard, elle recouvrit ses biens, dont sa maison d’Épinay où elle mourut oubliée en 1813, à 66 ans, sans avoir réussi à renouer avec son succès passé. Quand Marie-Jeanne décida-t-elle de prendre le nom de Rose et d’ailleurs, le prit-elle vraiment ? Il semblerait que des historiographes du XIXe aient choisi de la baptiser ainsi par souci d’esthétique. De même que l’on soupçonne Jacques Peuchet, d’être l’auteur des Mémoires de Mademoiselle Bertin sur Marie-Antoinette parues en 1824, c’est-à-dire onze ans après la disparition de Rose. D’aucuns prétendent aussi qu’elle aurait conduit la reine à sa perte dans une frénésie dépensière. Quoiqu’il en soit, deux petits chefs-d’œuvre de la confection textile subsistent aujourd’hui encore et un récit sur fond de conte de fées, mais riche d’enseignements sur les pratiques et mœurs de la cour avant la Révolution.

 

Références :

Mémoires de Mademoiselle Bertin sur Marie-Antoinette, avec des notes et des éclaircissements

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6560289h/f301.item.texteImage.zoom

 

https://books.google.de/books?id=R5YMAQAAMAAJ&printsec=frontcover&hl=de&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

 

Ancien monastère du carmel de Jésus-Maria

34-36 Rue des Capucins

80100 Abbeville

 

Ouverture

Du mardi au samedi de 14 h 00 à 18 h 00

 

Visite libre – entrée gratuite

 

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Tarif : 4 €/adulte

Renseignements/réservations : service des publics 03 22 20 29 69

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