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La plus ancienne crêperie amiénoise, fondée en 1972. Ma madeleine de Proust.

Infatigable et passionnée, Françoise Le Bris est une restauratrice hors du commun. À la tête de La Mangeoire, la plus ancienne crêperie d’Amiens, cette femme d’une élégance sereine et d’une efficacité redoutable conjugue exigence, humanité et amour du métier. Retour sur un parcours guidé par la passion, le goût des bonnes choses… et une bonne étoile.

L’art de maîtriser un quotidien chargé sans jamais rien précipiter
Françoise Le Bris est une femme pressée, qui a toutefois l’art de prendre le temps de vous recevoir. Elle m’accueille dans son bureau, à l’étage de La Mangeoire. Son téléphone sonne. Elle prend rapidement l’appel d’une cliente souhaitant savoir si elle peut venir manger en plein après-midi. Aucun problème, le restaurant est ouvert en continu. Françoise raccroche, se focalise à nouveau sur notre entretien. Cette concentration, elle l’accorde à chacune de ses tâches, ne jetant que des regards fugitifs sur son téléphone qui tinte à mesure que les messages affluent. Tout ce que Françoise accomplit se fait avec beaucoup d’aménité, avec concision, sans chichis et par-dessus tout, malgré l’administratif à régler, les rendez-vous et autres tâches qui l’attendent, cette femme aux gestes mesurés, élégante de pied en cap ne se départit pas de son sang-froid, procédant avec un calme contagieux. Tout est cadré de sorte que même si son temps est compté, elle ne donne pas le sentiment de devoir se hâter.

 

Retour aux sources d’une Bretonne infatigable et déterminée
Il y a environ six ans, pressée par ses enfants, qui trouvaient qu’elle pourrait peut-être lever le pied, l’énergique Bretonne s’était décidée à rentrer dans sa région natale après quatorze ans en tant que restauratrice et caviste bio dans un cadre féerique près du château de Compiègne – plus facile à dire qu’à faire quand on a comme elle le métier dans le sang. « Il faut être passionnée », m’explique-t-elle, « chaque détail compte : les achats, l’hygiène, l’accueil, trouver les bons collaborateurs, trouver pour eux le bon rythme de travail. » Non seulement Françoise a le goût des bonnes choses, mais elle a aussi le sens de l’humain. Elle semble lire en vous et n’est certainement pas femme à s’en laisser compter – trop d’expérience pour cela. Elle observe qu’elle doit faire preuve de psychologie pour former et diriger son équipe. En l’écoutant parler, c’est plutôt le mot humanité qui me vient à l’esprit tant on la sent attachée au bien-être de ceux qui l’entourent – de même qu’à celui de sa clientèle. C’est d’ailleurs cette passion qui la rattrapa quand, alors qu’elle envisageait de vendre son restaurant dans l’Oise, elle partit suivre une formation de maître crêpière à Rennes, avec une vague idée de maison en bord de mer où elle ferait des galettes pendant la saison touristique. C’était compter sans le destin.

 

Amiens, le coup de foudre inattendu

Françoise, à qui son restaurant gastronomique, n’avait pas laissé beaucoup de loisirs de nombreuses années durant, décida d’aller se balader à Amiens qu’elle n’avait pas revu depuis quinze ans. Ce fut le choc : « Gilles de Robien était passé par là », précise-t-elle, comme l’expriment d’ailleurs beaucoup d’Amiénois et de visiteurs pour qui l’ancien maire a changé le visage de la ville, devenue à leurs yeux grâce à lui plus ouverte, plus claire, plus accueillante. Cette visite, en plus de la séduire, lui envoya un signe de la providence puisque La Mangeoire était à vendre. Les astres s’étaient alignés pour lui ouvrir la voie vers une nouvelle aventure.

 

Une tradition perpétuée sous le signe de l’exigence et la bienveillance
Ainsi, cette crêperie, la plus ancienne d’Amiens, située à deux pas de la cathédrale et où mes parents, mon frère et moi nous rendions jadis régulièrement avant d’aller aux nocturnes de la patinoire, perpétue-t-elle, après quatre ou cinq changements de propriétaires, une tradition vieille de plus d’un demi-siècle puisqu’elle fut créée en 1972. Pour Françoise Le Bris, la qualité est un maître-mot qui se retrouve dans les produits bio et le fait-maison, sa signature : chez elle, tout, des légumes à la vinaigrette, qui a toujours un goût de trop peu, en passant par la chantilly, dense et sucrée à souhait, ou encore le caramel au beurre salé, est confectionné chaque jour au restaurant. Et rien ne lui échappe. Elle sait qu’un restaurant est un tout, car comme elle me le détaillait au début de notre entretien, l’ensemble doit être cohérent : qualité, saveur, accueil, hygiène et compétence du personnel, un personnel qui virevolte pendant le coup de feu de midi et du soir, veillant toujours à conseiller, ou à se mettre en retrait quand il faut, même si le restaurant est plein – un client, ça ne se brusque pas – et à être attentif aux souhaits des convives, toujours avec une petite plaisanterie ou un mot gentil sur les lèvres.

 

Une vie bien remplie et toujours des rêves plein la tête

Françoise a sans conteste réussi son projet. Celle qui ne rechigne pas à rouler trois heures par jour pour se rendre au travail et rentrer à la maison, sans jamais emprunter les autoroutes qu’elle déteste, sauf peut-être quand il fait vraiment mauvais, préfère les chemins de traverse, plus calmes, où l’on va plus doucement ; peut-être pour compenser le rythme effréné d’un métier que la passion la pousse à exercer quasi sept jours sur sept et qu’elle n’abandonnera que quand il lui pèsera. Son prochain rendez-vous approche. Elle conclut en rêvant à la maison face à la mer où elle jardinerait, une passion dont elle fait profiter le restaurant avec des herbes de son jardin, aux voyages pour lesquels le temps manque, à la cuisine, une autre passion, aux balades qu’elle affectionne ou – même si son fils ne la prend pas au sérieux – à l’achat d’un camping-car pour partir le nez au vent avec ses quatre chats, deux chartreux casaniers et deux minettes européennes aventureuses. Ce sont pour l’instant juste des idées flottant dans les brumes de l’avenir. Elle me confie en effet que la retraite aurait certes déjà pu sonner pour elle voici quelques années mais qu’elle n’est pas décidée pour l’instant à changer de passion. Et à la voir ainsi, Françoise donne l’impression que même mille vies ne suffiraient pas à épuiser son énergie.

 


 

La Mangeoire
3 rue des Sergents

8000 Amiens
Tél. : 03 22 91 11 28

Facebook : Crêperie La Mangeoire

Ouvert tous les jours en service continu (sucré et salé) de 11 h 30 à 22 h 00

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